La mode masculine au fil des ans vue par Peter L. Greer

La mode masculine évolue constamment d’année en année. Les styles et les tendances vont et viennent formant une forme de cycle perpétuel. Et c’est exactement ce qu’a pu constater Peter Greer, véritable encyclopédie vestimentaire, depuis le début de sa carrière comme styliste, il y a 35 ans déjà. On est allé à la rencontre de Peter Greer, Styliste expert. Découvrez son histoire sartoriale et sa vision du style!

L’ÉVOLUTION DE LA MODE MASCULINE

RALPH LAUREN: UN PIONNIER DE LA MODE MASCULINE

Celui-ci commence sa carrière en 1986 à Ottawa dans une boutique d’une marque bien connue: Ralph Lauren. À l’époque, l’entreprise avait une très grande présence à travers les grandes villes canadiennes et proposait un élément différenciateur important: au lieu de se rendre chez un grand détaillant comme la Baie d’Hudson, il y avait des magasins Ralph Lauren pour s’y procurer des vêtements comme leur porte-étendard, le fameux Polo. Peter a toujours considéré ces boutiques comme de véritables mini-musées, principalement en lien avec la présentation en sections séparées par gamme de produits unique. C’est dans la section plus formelle que Peter se sentait le plus à l’aise, ce qui était quelque peu prémonitoire pour la suite de sa carrière, c’est-à-dire devenir un véritable expert passionné par les complets pour hommes. Âgé d’à peine 21 ans, il aimait déjà le “vibe” du complet, l’énergie qu’il dégage.  D’ailleurs, c’est cet amour du Sartorial qui fut relié à ses premiers succès dans l’industrie. 

VÊTEMENTS DE NOSTALGIE ET UNE TOUCHE DE MODERNITÉ

À Ottawa, capitale officielle du Canada, les gens travaillant souvent pour la fonction publique n’étaient pas très extravagants avec leur style; c’était aussi le cas de la plupart des grandes villes gouvernementales durant les années 80. Les vêtements que ceux-ci achetaient et décidaient de porter au quotidien devaient durer longtemps et être assez sobres. Quand les premières boutiques Polo ont fait leur apparition dans la ville, les gens s’y rendaient, car celles-ci étaient perçues comme un vent de fraîcheur, ce qui était assez ironique, car Ralph Lauren est le grand spécialiste de ce que l’on peut qualifier de “vêtements de nostalgie”: la raison d’être de l’entreprise est de revisiter le passé pour concevoir ses nouvelles collections, ainsi que la coupe et le style des vêtements qui les composent. 

LA MODE RÉTRO MODERNE

Désireux de créer l’illusion d’acheter un produit qui vient de Londres, alors que tout était conçu en Amérique, Ralph Lauren a recréé ces articles classiques tout en étant très ambitieux dans ses créations. Ce fut alors le retour des cravates à rayures Ivy League, des chemises à col américain (les fameux OCBD) que l’on ne pouvait trouver qu’à Boston ainsi que des complets élégants et typiquement anglais, sans avoir à traverser l’océan pour les acheter.

Le look de ces vêtements était très traditionnel, mais avait une coupe plus longue et plus forte. Aucun homme ne portait de vêtements serrés comme on le voit aujourd’hui. Le look vestimentaire de l’époque, qui était assez universel dans le domaine de la mode masculine, était de présenter une coupe un peu plus large et évasée pour créer un style assez rétro rappelant la mode des années ‘30.

L’ÉVOLUTION DES STYLES ET DES COUPES

Si on “colle” des vêtements sur quelqu’un, les imperfections vont ressortir. Par contre, si le vêtement a lui-même une forme qui lui est propre, on peut donner cette forme au corps et c’est ce qui a fait le succès du complet dans les années ‘30, et pourquoi ce genre de coupe revient aujourd’hui. 

Au Canada, nous avons toujours été en retard côté mode. À quelques mois des États-Unis et quelques années en Europe. Cela peut provenir de la sorte de philosophie commune que nous avons ici de nous conformée aux autres, de ne pas vouloir trop sortir de l’ordinaire, et donc d’attendre que les autres le fassent avant de se lancer dans une nouvelle tendance. Les gens veulent voir leurs amis et leurs collègues porter quelque chose avant de l’essayer eux-mêmes. Le simple fait d’être exposé à des magazines et des images ne suffit pas pour prendre l’initiative.

DE L’EUROPE À L’AMÉRIQUE : L’ART DE DEVENIR UN EXPERT DE LA MODE MASCULINE 

À peine quelques années plus tard, lorsque je travaillais en Europe, j’ai pu observer le début de cette tendance des complets à devenir de plus en plus serrés, notamment chez les tailleurs français.

Peter L. Greer.

“Le fait d’arborer des tenues plus classiques a fait en sorte que ma clientèle avait presque le double de mon âge; j’avais beaucoup d’affinités avec les 40 ans et plus, parce que la façon dont je m’habillais, qui est la même qu’aujourd’hui, je leur rappelais une époque à laquelle ils s’identifient, souvent celle de leurs parents ou même grands-parents”, nous raconte Peter. Avec l’arrivée des tailles plus ajustées chez les stylistes européens, l’effet n’a pas tardé à se faire sentir en Amérique: les hommes devenaient beaucoup plus conscients de leur corps, et cela se reflétait maintenant aussi dans leurs vêtements. 

LE PASSAGE D’UN AMATEUR À UN EXPERT STYLISTE

Ce que Peter veut faire dans sa pratique, c’est rendre les choses simples pour ses clients. “C’est de prendre des concepts complexes et de les présenter à mes clients pour qu’ils les comprennent, sans avoir besoin d’un PhD en stylisme”, explique-t-il. C’est à partir de là que Peter a commencé à se sentir détaché de la marque, parce que la direction que celle-ci prenait ne correspondait pas à ce qu’il voulait accomplir. Pour porter les vêtements offerts chez Ralph Lauren, il fallait être un spécimen presque parfait, parce que plus une coupe est ajustée, plus les défauts de nos corps ressortent. La réalité est que cela ne s’applique pas à la majorité des hommes. Et quand un homme porte un complet, c’est pour être à son meilleur. Avec des vêtements qui sont faits sur mesure, Peter peut s’assurer que chaque client a une coupe qui correspond à son corps, le mettant à son avantage! 

Cette nouvelle tendance a créé une demande pour des costumes très ajustés. Ce qui rendait presque désuètes beaucoup de pièces achetées dans les années ‘80. C’est une chose avec laquelle Peter n’est pas d’accord: un complet devrait durer le temps d’une vie, pas s’éteindre avec la mode rapide qui va et vient. Bien qu’à l’époque cela ne changeait pas grand-chose, aujourd’hui à l’ère du développement durable, Peter est soudainement redevenu “à la mode”. D’ailleurs, c’est quelque chose qu’il prône depuis le début de sa carrière: “De mieux acheter et d’acheter moins”. Le coût initial sera certes plus élevé, mais cela en vaut la peine à long terme, tant monétairement que côté style. Ce sont des vêtements qui valent aussi la peine d’être réparés, ce qui ajoute à leur durée de vie. Apprenez-en davantage sur les bienfaits du sur mesure en lisant l’article Mode durable: le fast-fashion vs le sur mesure.

CONSEIL DE STYLE POUR L’ANNÉE

COULEUR DE L’ANNÉE 2021 SELON PETER : LE VERT

“Le vert. J’aimerais dire le brun, mais cette couleur semble paraître trop classique et ne semble jamais accrocher l’œil de mes clients, même si elle a beaucoup de potentiel. Le vert est de plus en plus courant dans les habits que je conseille, j’en porte même un en ce moment! Ce qui est difficile avec cette couleur, c’est son accessibilité; il n’y a pas beaucoup de manufacturiers qui en offrent, ce qui fait que nous sommes assez limités côté motifs. On peut donc se concentrer sur les différentes teintes de vert si on désire se démarquer.”

PRENDRE RENDEZ-VOUS AVEC PETER >

Mode durable: le fast-fashion vs le sur mesure

Ah! Le fast-fashion. C’est un terme de plus en plus à la mode. C’est tellement tendance que le terme n’existe pour l’instant qu’en anglais; on pourrait dire mode rapide? Tenues express? Garde-robe à la mode?

Plus sérieusement, c’est un modèle d’affaires qui est arrivé en Amérique au début des années 90 et qui dure encore aujourd’hui. On le compare souvent au fast-food, car ces deux concepts partagent beaucoup d’éléments dans leur fonctionnement.

Mais quand on parle de fast-fashion, on parle de quoi exactement?

De façon générale, on qualifie de fast-fashion la production de masse de vêtements peu chers et à la mode. Le but est simple: on favorise l’achat en grande quantité de vêtements de basse qualité, pour les remplacer quelques semaines ou mois après. Ce modèle d’affaires est tellement bien implanté qu’on ne se rend presque plus compte qu’il existe. On l’accepte, on l’entretient, on le fait durer.

C’est donc ça que nous allons essayer de démystifier dans cet article:

Mode durable, style durable

Changer fréquemment de style est à éviter. C’est peut être cool à 16 ans, mais rendu à l’âge adulte rien ne crie plus l’insécurité vestimentaire qu’un homme qui change de garde-robe tous les 3 mois. Acheter de beaux vêtements de qualité ne garantit pas seulement d’avoir un style à toute épreuve pour les mois et années à venir, mais cela atteste aussi que vous avez confiance en vous et n’avez pas peur de vous exprimer.

Des vêtements qui vous vont à merveille et qui sont achetés en ayant en tête une finalité font en sorte que l’on fait des choix plus éclairés et que les différentes pièces achetées peuvent se mélanger entre elles, ce qui multiplie les options de style qui s’offrent à nous. Un t-shirt avec des motifs complexes ou un gros logo en plein milieu ne sont pas les vêtements les plus versatiles, et sont donc souvent les premiers sur la liste des pièces qui s’accumulent dans le fond du garde-robe une fois la saison terminée.

Privilégier des couleurs neutres comme le noir, le blanc et le gris est un pas dans la bonne direction. À l’instar des motifs complexes et des couleurs retentissantes, on ne se trompe pas avec celles-ci. C’est le même cas pour les jeans: peu importe la tendance du moment, une belle paire de jeans est versatile et indémodable.

Deux hommes portant des jeans et une chemise
On ne se trompe jamais avec des jeans et des couleurs neutres.

Environnement

On le voyait venir, mais il est évident que le fast-fashion a un impact considérable sur l’environnement. Un très gros impact, même. Selon le programme pour l’environnement de l’ONU, l’industrie de la mode est responsable pour 8 à 10% des émissions globales de carbone. Pour mettre ça en perspective, c’est plus que tous les vols internationaux et les livraisons par bateau combinés!

L’industrie est aussi la deuxième plus grande consommatrice d’eau, générant presque 20% des eaux usées, en plus d’un demi-million de tonnes de microfibres dans l’océan chaque année. Ouch.

Le consommateur alimente ces statistiques d’année en année, lui qui achète en moyenne 60% plus de vêtements qu’il y a 15 ans. Ce n’est pas attribuable à une augmentation soudaine du pouvoir d’achat ou à une dégradation instantanée des garde-robes de centaines de milliers de personnes: on achète plus, plus souvent. C’est aussi simple que cela.

Mais bon. Nous ne sommes pas ici pour faire la critique de la société de consommation; d’autres gens mieux informés et plus crédibles que nous sont là pour le faire. Par contre, le domaine où nous sommes des experts, c’est le fait sur mesure. Et ça tombe bien, celui-ci fait partie de la solution pour mettre un peu d’ordre dans cette industrie chaotique.

Le sur mesure: un bon départ

Il est évident qu’on ne peut pas délaisser du jour au lendemain un modèle de consommation entier. De plus, il doit bien être là pour une raison; l’accessibilité n’a jamais été aussi forte et le choix est aussi varié qu’on le souhaite. Et ça ne coûte pas cher, aussi. C’est une réalité avec laquelle il faut composer.

Les vêtements sur mesure offrent de nombreux avantages, nous en avons même discuté dans un autre article.

Sans trop en dire long à ce sujet, on pourrait résumer ça en quelques points:

  • La coupe s’adapte parfaitement à votre morphologie
  • Vous bénéficiez de la meilleure expérience client possible
  • Vos vêtements sont personnalisés de A à Z pour être à votre image

Le dernier élément est particulièrement intéressant; on ne parle plus ici de simplement se vêtir par convention sociale, mais plutôt de faire en sorte d’intégrer ce dont on se vêtit comme une partie de notre identité.

Homme noir portant un complet avec des pantalons brun et un veston gris
Faire ses vêtements sur mesure est un excellent moyen de se démarquer en plus d’être écoresponsable

Se détacher du fast-fashion: quelques conseils

Bon! Vous vous êtes réveillés avec un surplus d’énergie et avez pris la décision de mettre de l’ordre dans votre garde-robe et de vous débarrasser de vos vêtements inutilisés. Mais où commencer? Devrait-on tout jeter aux poubelles? Bien sûr que non! De nombreuses options s’offrent à vous:

Réduire sa consommation

C’est presque trop évident comme solution, mais elle n’en perd pas sa légitimité pour autant! Faire des choix plus réfléchis quand vient le temps de s’acheter un nouveau morceau et un pas dans la bonne direction. Comme mentionné plus tôt dans l’article, privilégier des pièces versatiles qui se portent dans plusieurs combinaisons possibles et dans de nombreux contextes est un excellent moyen de réduire sa consommation de textiles. C’est non seulement bon pour l’environnement, mais aussi pour votre portefeuille!

Faire un don à une friperie

Les friperies sont les endroits parfaits pour donner une seconde vie à vos vêtements. En plus de permettre à d’autres individus de se procurer des vêtements à prix modique, vous contribuez au bien être de l’environnement. En effet, selon la Semaine Canadienne de Réduction des Déchets, c’est 10 millions de tonnes de déchets textiles qui sont jetés chaque année, alors que 95% de ceux-ci pourraient être réutilisés ou recyclés.

Le recyclage et le surcyclage

De nombreux organismes offrent des services de récupération des matières textiles pour les réutiliser. En plus de réduire l’empreinte carbone issue des matières textiles, beaucoup d’organismes emploient des gens dans le besoin, comme Le Support, qui promeut l’inclusion sociale et professionnelle de personnes souffrant de déficience intellectuelle.

De plus, il y a l’upcycling, qui est un service que de plus en plus de créateurs offrent. C’est quoi ça? Connu sous le nom de surcyclage en français, c’est le principe de récupérer des vêtements usés, démodés ou invendus pour en créer de nouvelles pièces. Bien que plus dispendieux que ce que vous allez trouver chez H&M, se procurer des vêtements issus du surcyclage permet de soutenir des créateurs de votre localité en plus d’arborer un style unique.

En conclusion

Nous espérons que vous en savez plus dorénavant sur le fast-fashion, ses impacts et ce que vous pouvez faire pour en diminuer les effets. Bien qu’il n’existe pas de solution magique à cet enjeu, c’est en faisant tous notre part que nous nous dirigerons dans la bonne direction!

Notre dernier conseil: faites l’ajout de quelques vêtements faits sur mesure à votre garde-robe, votre style et votre empreinte écologique vous diront merci!

PRENDRE RENDEZ-VOUS >